Positionnement actuel
La fente labio-palatine est la malformation congénitale du visage la plus fréquemment rencontrée. On dénombre 800 nouveaux cas par an en France. Parmi les fentes labiales et/ou palatines, 75% sont couplés à un défaut osseux prémaxillaire (ou fente alvéolaire). Cette malformation a un impact psychologique, esthétique et fonctionnel pour chaque nouveau-né atteint. La fente alvéolaire est réparée entre 4 et 6 ans (plastie parodontale et greffe osseuse d’origine iliaque ou tibiale). Le prélèvement osseux engendre une nouvelle cicatrice, des douleurs post-opératoires, et allonge le temps chirurgical. Chez l’adulte on recense près de 10% d’échecs. Les solutions alternatives actuelles sont représentées par les substituts osseux et l’ingénierie tissulaire. Les matériaux sous forme de blocs insérés entre les berges de la fente donnent généralement de mauvais résultats en raison de la faible surface de contact entre os et matériau. Lorsque des granules sont utilisés seuls, le risque d’extrusion du matériau est réel compromettant le comblement du défaut osseux. Le ciment phospho-calcique présente l’avantage d’épouser parfaitement la forme complexe du défaut osseux et apporte une excellente stabilité primaire. Malheureusement, la structure interne du ciment est peu interconnectée ce qui empêche l’adhésion cellulaire, la diffusion des fluides, et finalement l’ostéoconduction. Quand des granules sont associés à des agents bioactifs, la formation osseuse est parfois comparable à celle de la greffe osseuse autologue. Cependant la thérapie cellulaire est complexe, chère, et questionnable dans cette indication médicale ou une procédure efficace – quoique invasive – existe déjà. Grâce aux travaux antérieurs du laboratoire RMeS sur les ciments phospho-calciques, et sur l’apport de la moelle osseuse totale en réparation osseuse, et au vu de l’importance grandissante de l’impression 3D dans le domaine médical, nous pensons qu’il est possible de développer un ciment imprimé en 3D, capable de mouler parfaitement la surface osseuse du défaut, et d’offrir une architecture interne prédéfinie favorisant la diffusion des cellules et des fluides. L’ajout de moelle osseuse totale au ciment devrait améliorer les performances du matériau et permettre de réparer une fente alvéolaire.
Objectifs : nous souhaitons développer un ciment composite imprimé en 3D, personnalisé, capable de réparer une fente alvéolaire dans un modèle préclinique, et nous espérons obtenir les mêmes résultats de repousse osseuse qu’avec la technique de référence. Idéalement ce projet devrait être la marche ultime vers un essai clinique multicentrique.
Résultats attendus
1/ Formulation d’un ciment biocompatible et imprimable (sans agent de réticulation toxiques), ayant de bonnes propriétés mécaniques, une porosité adaptée pour permettre les échanges de fluides et de cellules nécessaires au renouvellement osseux, biodégradable pour laisser place à l’os nouvellement formé, et ductile pour répondre aux sollicitations mécaniques.
2/ Conception d’un modèle numérique destiné à créer l’architecture interne optimale pour favoriser la repousse osseuse, et une structure externe simulant la forme globale des défauts osseux alvéolaires.
3/ Evaluation préclinique du ciment dans un modèle canin de fente alvéolaire spontanée proche de l’indication clinique. Il s’agira d’une étape ultime avant de planifier un essai clinique. Les chiens opérés seront secondairement proposés à l’adoption.
Méthodologie
afin de répondre aux objectifs de ce projet nous prévoyons une thèse de 3 ans, 3 étudiants en M2 ainsi qu’une année de post doctorat. Le ciment composite HydroxyPropylMethyl cellulose (Si-HPMC) et calcium phosphate développé par Liu et al. au laboratoire RMeS servira de base afin d’élaborer d’autres ciments composites. Le Si-HPMC étant faiblement dégradable, l’ajout d’un polymère naturel tel que l’acide hyaluronique, le pullulane, ou le chitosane sera étudié. Les différents intervenants du projet seront inviter à apporter leur expertise respective : le laboratoire RMeS pour la formulation et la caractérisation physico-chimique des ciments, le laboratoire LS2N pour la programmation des trajectoires et le monitoring du procédé de création du modèle numérique, ainsi que pour l’impression 3D, le laboratoire GEPEA et l’INRA pour la caractérisation mécanique des pièces imprimées, ONIRIS pour l’évaluation in vivo sur modèle préclinique, le laboratoire de l’Université de Laval (Canada) pour l’impression 3D de gels cellularisés et les analyses in vitro.